Le chanteur Herbert Léonard s’est éteint le 2 mars 2025.
« Herbert est décédé à 18h à l’hôpital de Fontainebleau. Il luttait depuis quelque temps contre un cancer du poumon. »
Originaire de Strasbourg, il a quitté l’Alsace dans ses jeunes années. Mais il a laissé beaucoup de souvenirs dans la région, où il venait encore à l’occasion pour se produire sur scène. Témoignages d’hier et d’aujourd’hui.
« Je suis triste, je ne m’en remets pas, c’était toute notre jeunesse ». Au lendemain du décès d’Herbert Léonard, l’émotion est vive pour Jean Kohl. « Jeannot », pour les intimes, a été l’un des premiers compagnons de scène du chanteur. « C‘était au début des années 60. Herbert avait fondé le groupe des Jets . Ils cherchaient un guitariste. Je les ai rejoints, c’est comme ça qu’on s’est rencontrés. » Jean avait alors 15 ans, Herbert 17. Le premier travaillait déjà, le deuxième venait d’arrêter ses études qui ne le passionnaient pas.
À cette époque, Herbert Léonard s’appelle Hubert Loenhardt. Et il n’est pas encore chanteur, mais guitariste et choriste. « J’étais admiratif de sa voix. Elle était à part, il avait une présence vocale incroyable, on lui disait qu’il fallait qu’il en fasse quelque chose » se souvient Jeannot. Ensemble, ils se produisent alors dans les clubs de Strasbourg comme le chalet, le sporting palace ou le coucou des bois où ils font twister la jeunesse en reprenant des tubes américains.
En 1964, le service militaire va interrompre ce premier chapitre de la vie musicale d’Herbert Léonard. Passionné d’avions russes au sujet desquels il publiera un livre (Les avions de chasse russes et soviétiques de 1915 à 1950, publié en 1995 par les éditions Heimdal), il devance l’appel en rejoignant l’Armée de l’air à Metz.
De retour à Strasbourg, sa place a été prise chez les Jets. Et dans le cœur de sa belle. Jean Kohl se souvient : « il m’avait demandé de veiller sur sa chérie pendant qu’il était à l’armée ». Ce qu’il a fait avec la plus grande attention. Et qui a valu – au retour du soldat – une scène mémorable. « Elle a dû choisir entre lui et moi. Je me rappelle que ce jour-là, on était tous les trois dans l’appartement d’Herbert, place Sainte-Aurélie. J’avais qu’une trouille, c’était qu’elle ne me choisisse pas ». Mais c’est finalement bien avec lui qu’elle est repartie. Et ils ne sont depuis plus quittés.
S’il n’a plus de chérie, Herbert léonard ne reste pas longtemps sans partenaires musiciens. Un groupe de passage à Strasbourg recherche en urgence un guitariste. Les Lionceaux – originaires de Reims (Marne) – ont déjà leur petite notoriété : l’année précédente, ils ont accompagné le très prometteur Johnny Hallyday en tournée.
« Herbert est parti en tournée avec eux, et c’était le début de sa nouvelle vie, se souvient Jean Kohl. Il n’a plus vécu en Alsace après cela. »
Le groupe se dissout en 1965 mais l’aventure aura été décisive pour la future vedette strasbourgeoise. Car le père de Johnny, le producteur Lee Halliday, a décelé son talent. C’est lui qui le pousse à chanter et à prendre son pseudo d’artiste, le propulsant dans la carrière de grand chanteur romantique qu’on lui connaît.
Herbert Leonard n’a plus jamais revécu en Alsace. Mais il y est revenu parfois. Pour son public. La foire aux vins de Colmar l’a accueillie aux côtés de Johnny en 1968, il a fait le show en 2015 aux estivales d’Obernai et lors de ses passages avec la tournée Age tendre et têtes de bois.
Plus récemment, il se plaisait à revenir dans un cadre plus authentique et plus confidentiel, bien loin des salles mythiques qu’il a foulées comme l’Olympia. C’est Guillaume Schmidt qui lui a offert ses dernières scènes alsaciennes. Gérant du restaurant Le Moulin à Bischwiller (Bas-Rhin), il travaillait auparavant dans l’événementiel où il a eu l’occasion de rencontrer l’artiste.
« Chez nous, c’est très particulier pour les artistes. On est un restaurant qui organise des concerts. Donc les gens mangent en même temps qu’ils écoutent. Et ils sont très près de la scène : à quelques centimètres seulement ».
Je pensais qu’il accorderait dix minutes aux spectateurs pour faire des photos. Il est resté plus d’une heure !Guillaume Schmidt
Gérant du Moulin, à Bischwiller
Un cadre que semblait apprécier le crooner, venu se produire sur place en juin 2023. « Il était incroyable. Après le concert, les gens aiment bien faire des photos avec les chanteurs. Je pensais qu’il n’aurait que dix minutes pour cela : il est resté plus d’une heure avec le public ! »
« Quand il venait, il aimait bien renouer avec ses racines alsaciennes. La dernière fois, il m’a fait bien rire, raconte avec sourire Guillaume Schmidt. Pour le repas, il voulait une bouchée à la reine à l’alsacienne. Et en entrée, il m’a demandé des waedele (jarrets de porc). Je lui ai dit que ça risquait d’être très copieux. Mais il a tout pris. Avec du champagne. »
Herbert Léonard devait revenir le 22 février dernier pour une nouvelle soirée de représentation. « Sa femme m’a appelée quelques jours avant pour me dire qu’il était trop fatigué », détaille Guillaume. Puis je l’ai eu mardi dernier au téléphone pour son anniversaire (le 25 février), on parlait encore de la date pour reprogrammer son spectacle ».
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